Depuis son arrivée en Terre Sainte comme volontaire à l’École Biblique, Clémence ne s’est pas enfermée à l’intérieur des murs de cette institution.
Négocié avant son arrivée, un temps « donné ailleurs » lui permet de mieux s’ancrer dans la vie de cette terre complexe. L’École lui avait fait quatre propositions : scoutisme dans le groupe Saint-François-Sainte-Claire, E.h.p.a.d. chrétien d’Abu Dis, conversation française au Séminaire latin de Beit Jala… Elle a opté pour la Crèche des Filles de la Charité, à Bethléem. Témoignage.
Ici, depuis 140 ans, les sœurs recueillent les enfants abandonnés à travers toute la Palestine.
Dans les murs de cet orphelinat se trouvent des enfants qu’un membre de la famille est venu déposer. Ils y resteront jusqu’à 6 ans, avant de rejoindre un autre centre pour enfants plus grands. Ils sont trop pauvres…ou “enfants de la honte”. Après un viol ou un inceste, abandonnés secrètement dans une rue ou dans un champ, ils sont recueillis miraculeusement ici. La disgrâce d’un enfant hors mariage reste si forte, que les familles arabes peuvent aller jusqu’à la mort de la mère et de l’enfant pour laver la honte. Ces femmes n’ont alors d’autres choix que l’abandon pour leurs enfants.
Depuis le Covid, le nombre d’enfants incestueux abandonnés a grimpé en flèche. Ce n’est pas une découverte évidemment, la vie n’est pas belle partout. Cependant, y être confronté si violemment permet de réfléchir différemment.
C’est donc avec une grande motivation, que je me rends à Bethléem quelques après-midis par mois. Je suis attachée au groupe des six mois-un an ; ils apprennent à tenir assis, debout, et à faire quelques pas. Nous avons huit petits bouts de chou, tous plus craquants les uns que les autres. Je ne m’attarderai pas sur les histoires terribles qui les ont conduits ici. Mais je mets toute mon énergie pour les câliner, les faire grandir, les stimuler en rendant grâce d’avoir trouvé cette possibilité pour vivre autrement ma mission.
Paradoxalement, ces enfants m’aident à me sentir à ma juste place. Certains trouveront une famille d’adoption, d’autres resteront ici longtemps. L’important je crois, et de toujours garder en tête que toute vie mérite d’être vécue et aidée.
C de G