Jeune profès solennel, professeur de Lettres, frère Thomas Carrique, op, est arrivé de Lyon pour travailler avec l’équipe de la Bible en Ses Traditions deux semaines avant le début de la guerre. Un séjour bouleversé.
Qu’étiez-vous venu chercher en Terre sainte ?
Une plus grande proximité avec la Parole de Dieu. Je suis là pour scruter la Bible et la gloser dans le cadre d’un travail pour la Bible en ses Traditions. Nous développons l’application BibleArt, qui éditera entièrement une nouvelle traduction française de la Bible latine de saint Jérôme, la Vulgate, accompagnée d’une armada de notes magnifiques sur l’histoire de la Bible, toute son influence en Occident dans les arts, la culture, sur les liturgies juives, chrétiennes. C’est gigantesque !
Comment la guerre a-t-elle changé votre prière ?
Déjà, les larmes que j’ai pu verser devant tous ces morts, face à cette haine qui trouve son écho dans le monde entier. Ici, la Bible vous rattrape nécessairement. Elle vous “saute au visage” si j’ose dire. Quand on la lit, quand on chante les psaumes plusieurs fois par jour en communauté, ou encore par la toponymie des lieux. Imaginez, je vois le dôme du Saint-Sépulcre depuis ma fenêtre ! Chaque nuit, la croix à son sommet brille dans l’obscurité. La foi et l’histoire du salut sont au cœur du quotidien.
Avec cette guerre terrible, je mesure à quel point la Parole de Dieu est absolument vivante, vraie, nécessaire : à quel point elle vient à notre secours. Tout résonne, que ce soit dans l’ordre de l’espérance, de la joie malgré l’épreuve, ou dans la désolation la plus totale. Dieu met sur nos lèvres les mots que nous avons déjà confusément sur le cœur. Et cela nous sauve – je crois que c’est vraiment le même Christ qui nous sauve, celui qui est mort pour nous tous là-bas, à un quart d’heure à pied de mon couvent, à une époque pas si lointaine ; et celui qui me parle aujourd’hui par les Écritures, par son Esprit. C’est Lui qui sauve, et comme je voudrais que tous, dans ce pays, soient illuminés par Lui…
Et puis il y a le chapelet, le Rosaire que nous nous sommes mis à prier ensemble au couvent, étudiants et frères, pour les victimes et pour la paix, chaque soir à 19 heures. C’est un moment bienfaisant et grave.
Qu’aimeriez-vous dire à ceux qui prient pour la Terre Sainte ?
“Paix sur Israël !” C’est ce que le Christ a dit avant sa mort : “Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix”. Il y a toujours beaucoup de raisons de faire la guerre, le meurtre appelle le meurtre… Vienne la paix de Dieu, pas la vengeance des hommes. “Justice et paix s’embrassent” lit-on au psaume 84. Pas “justice et vengeance”, ni “vengeance et paix”.