Lorsqu’il était encore étudiant à l’École Normale Supérieure, Régis Burnet a réussi à concilier son travail de normalien et son intérêt pour la Bible en travaillant sur les épîtres de Saint Paul en grec. Il a ensuite enseigné en ateliers d’écriture dans des IUT, avant de devenir professeur de Nouveau Testament à l’Université Catholique de Louvain. Régis Burnet est également présentateur d’une émission de réflexion sur la foi pour la chaîne KTO depuis 2006. Cet attrait pour les textes bibliques, qui ne l’a pas quitté depuis ses années d’études, l’a conduit à demander une année sabbatique à son université, pour se consacrer à l’écriture de son vingtième livre[1].
Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Je travaille en ce moment sur l’histoire de la réception des textes bibliques, à travers les œuvres d’art. C’est-à-dire comprendre, d’après les représentations qu’on en a faites, comment différents passages ou différentes personnalités de la Bible ont été interprétés dans l’histoire, et comment et pourquoi cette interprétation a pu évoluer depuis.
En quoi est-ce important ?
Parce qu’on croit toujours arriver sans préjugés sur les textes que l’on aborde ; or, nous sommes imprégnés des œuvres qu’on connaît et qui nous influencent dans la compréhension de ces textes. Prendre conscience de ces préjugés nous permet de nous en détacher et d’aborder le texte de façon plus neutre, ou plus personnelle.
Le texte est un miroir, mais un miroir partiel. On le lit d’après nos codes et notre histoire, et l’étudier de cette façon nous fait nous poser la question de pourquoi le texte était interprété de telle ou telle manière à une certaine époque, et pourquoi nous l’interprétons personnellement, aujourd’hui, d’une autre façon. Sans remettre en cause le fait que le texte parle à chacun de manière personnelle, cela nous aide seulement à comprendre et à remettre en question nos propres clefs de compréhension, et donc à pousser plus loin notre réflexion.
Je pense par exemple à l’attitude de Thomas lorsque les disciples lui disent avoir vu le Christ ressuscité ; depuis le V-VIème siècle, on ne peut lire le texte que comme une condamnation de Thomas, qui aurait dû croire sans voir. Mais auparavant, le texte était lu comme Thomas qui doute non pas sur le fait que les autres disciples aient vu quelque chose, mais sur ce qu’ils ont vu.
Pourquoi être venu un mois à l’École biblique pour ce travail ?
D’abord parce que j’aime Jérusalem et que c’est un lieu particulier pour travailler sur les textes bibliques ! Par ailleurs, j’ai connu l’École en travaillant sur l’histoire de la réception pour la BEST (La Bible en ses Traditions) avec Fr. Olivier-Thomas Venard. L’École biblique est au cœur de l’histoire de la réception et regorge de savants qui creusent les différents textes de la Bible, et les conversations avec eux sont donc très intéressantes, pour moi et pour faire avancer mon travail.
Par ailleurs la bibliothèque de l’École, calme, belle et bien fournie est un lieu ou il fait bon travailler !
Et ensuite ?
Pour l’instant, je remercie beaucoup l’université de Louvain qui m’a donné l’opportunité de prendre cette année pour travailler sur mon livre. J’espère avoir terminé le manuscrit à la fin de l’année scolaire, puis je continuerai les cours sur le Nouveau Testament, jusqu’à ma retraite… pendant laquelle je reprendrai peut être les ateliers d’écriture que j’ai beaucoup aimé donner au début de ma carrière, édifié par ce que les étudiants étaient capables de produire, et par leur fierté de voir leurs créations !
[1]. Voir en particulier Épître et Lettres (Cerf : 2003), Marie-Madeleine de la pécheresse pardonnée à l’épouse de Jésus (Cerf : 2004), L’Égypte ancienne à travers les papyrus(Pygmalion : 2007) ; L’Évangile de la trahison, une biographie théologique de Judas (Seuil : 2007) ; Les Douze Apôtres (Brepols : 2013) ; Que celui qui ne travaille pas ne mange pas (Cerf : 2015).