Le frère Kevin Stephens, doctorant de l’École, terminera sa thèse bientôt. Envoyé ici en 2008, il dut regagner sa Province, à St. Louis, Missouri (USA), après avoir soutenu sa lectio coram en 2013. Il devient alors enseignant au centre des études — Aquinas Institute of Theology — à la fois séminaire et centre ouvert à tous. Cet investissement l’a beaucoup ralenti dans la finalisation de sa thèse. “Je dois donc la terminer cet été, le provincial m’a donné quelques mois car ici les ressources sont plus accessibles… et parce que tout le monde veut que je la finisse !” ajoute-t-il avec humour.
Nudité d’Isaïe
Sa thèse porte sur les actes d’Isaïe, notamment ce geste prophétique dont le sens est controversé, que l’on trouve au chapitre 20 : Isaïe marche “nu et déchaussé” pendant trois ans, en déconseillant Juda d’entrer dans l’alliance avec l’Égypte et les Philistins contre l’Assyrie. La révolte échouera finalement, et le peuple de Juda, n’ayant finalement pas pris part au combat, conservera sa liberté. D’une façon comparable mais pas pareille au chapitre 7 et 8, Isaïe, en présence de ses fils, Shear-Yashoub et Maher-Shalal-Hash-Baz, conseille le roi Acaz de n’avoir pas peur.
Considérant chaque acte comme un morceau de la rhétorique d’Isaïe, le frère s’interroge sur le sens du nudité au chapitre 20. Partant du principe que cet acte était une mise en scène du sort d’un prisonnier, plusieurs hypothèses : était-ce pour prédire le sort prochain du peuple de Juda, et auquel cas, la prophétie aurait-elle échoué ? Était-ce un moyen de prédire l’avenir de Juda si le roi prenait part à l’alliance, et auquel cas, ayant été écouté, sa manœuvre aurait-elle réussie ? Car explique-t-il, dans l’Ancien Testament, les prophéties ne sont pas toujours des oracles annonçant le futur, mais aussi des conseils sur le présent, en proposant une vision de l’avenir. Quoiqu’il en soit, le fr. Kevin a son idée précise, et la soutiendra prochainement à l’oral, une fois la dernière ligne achevée.
Aux commandes du système informatique de l’École
Ce frère, professionnel en informatique, est une aide très précieuse pour l’École. “Le directeur avait demandé à tous de ne pas me déranger pendant ce temps de rédaction, pourtant je n’y coupe pas !”. Le catalogue spécifique de la bibliothèque, le site de l’École et celui de La Bible en ses Traditions, sont des outils sensibles. Par sa performance technique, le fr. Kevin participe donc très activement à l’efficacité de notre institution. Merci à lui !
“Les questions politiques de ce pays n’apportent pas de complications, non. L’École étant française, les sites sont hébergés en France, or la connexion entre la France et le reste du monde est plus puissante qu’entre Israël et le monde. Ce qui permet une plus grande rapidité et une meilleure diffusion, c’est une bonne chose”.
En 2008, lors de sa présence ici, il a créé de toutes pièces le site de La Bible en ses Traditions. “Il y avait à l’époque plein d’idées, puis au moment de la phase de concrétisation, une proposition (whitepaper) a donné une hypothèse de création, mais qui ne convenait pas. Le week-end suivant, j’ai écrit la première version du site. C’était la première fois que l’idée était réalisée. Cela fait maintenant dix ans. Il est en permanence amélioré, pour une plus grande rapidité, de nouvelles fonctionnalités, etc. La technologie employée en 2008 était la meilleure, mais la vitesse de changement dans le monde informatique est incroyable : la technologie a donc changé graduellement, et nous sommes toujours en train d’améliorer notre site.”
Mais avant tout, un comédien devenu dominicain !
Plus profondément, c’est une carrure de metteur en scène et de comédien qui fonde la personnalité du frère Kevin. Littéraire et artiste, il est passionné de théâtre auquel il a douloureusement renoncé en entrant dans les ordres. “Il me manque tellement. Mais je peux dire que la boite à outil qu’il m’a donnée, la gestion de la voix, l’élocution, les références culturelles, m’est très précieuse. Elle m’est utile lors de mes prédications !”. Mais pour le moment, sa thèse et son enseignement l’occupent bien assez. “Je pense qu’Hamlet est la pièce la meilleure à jouer, mais elle n’est pas la meilleure pièce de Shakespeare : la meilleure, la plus profonde, serait pour moi Le Roi Lear” glisse-t-il avant de regagner la bibliothèque.