Du 7 au 8 avril, Émile Puech, professeur émérite de l’École biblique et du CNRS, et orientaliste spécialiste des manuscrits de Qumrân, était l’invité du Convegno di Studi Biblici organisé à Palerme, cette année sur les livres de Samuel. Des chercheurs du monde entier étaient invités à participer à ces deux jours de conférences au sein de la Faculté Pontificale de Théologie de Sicile.
Émile Puech y présentait quatre manuscrits datant de périodes différentes, allant de 250 à 25 avant Jésus-Christ, dont l’un d’eux (4Q51) comprend quelque 300 fragments ! Les passages retrouvés donnent un texte parfois différent du texte massorétique, avec des paragraphes nouveaux et certains manquants. L’un des quatre manuscrits est un des plus anciens rouleaux retrouvés dans la grotte 4 (le rouleau 4Q52), il est daté de -250 avant J-C., c’est-à-dire d’un siècle avant l’occupation de Qumrân par les Esséniens. Le rouleau 4Q51, lui, pose beaucoup de problèmes d’édition, même en s’aidant de la Septante, et une soixantaine de petits fragments n’ont pas encore pu être replacés.
Dans sa communication, Émile Puech a souligné notamment un mot en 1 Samuel 1 présent uniquement dans le manuscrit 4Q51 : dans sa prière au temple de Silo, Anne, l’épouse préférée et stérile d’Elqanah, fit le vœu que l’enfant demandé serait un « Nazir », « consacré à Dieu » pour toute sa vie. De fait elle consacra à Dieu Samuel comme « nazir ». Ces variantes de 1 Samuel 1,11 et 22 doivent être le passage prophétique auquel renvoie l’évangile de Matthieu (2 ,23) où Jésus, de retour d’Égypte, est appelé « Nazôréen ». Le « ô » inexpliqué viendrait du terme « Nazir » dans une copie de 1 Samuel (livre prophétique) où on ne distingue pas les « ô » et « î », non « de Nazareth », comme on l’a longtemps pensé, village inconnu des livres bibliques et n’expliquant pas ces confusions phonétiques.
Depuis 1998, des congrès et colloques à la Faculté de théologie de Sicile ont lieu alternativement tous les ans, Émile Puech y est toujours invité pour « rendre compte du lien entre les manuscrits de Qumrân et le livre biblique étudié ». Même si parfois le livre retenu est du Nouveau testament, un lien est toujours à faire avec certains manuscrits ! Par exemple, les renvois au Patriarche Hénoch dans l’épître de Jude, « les œuvres de la loi » dans les épitres de Jacques et de Pierre, etc.
“En y allant, je peux partager les fruits de mes recherches, et dialoguer avec les approches d’autres collègues qui travaillent sur le texte massorétique, la version syriaque, la vieille grecque, la vieille latine, les recensions antiochiennes, les targums, etc. Ainsi progresse la relecture des éditions des manuscrits, des corrections, …” explique l’épigraphiste, résident de l’École biblique depuis 46 ans.
Manuscrits présentés :
4Q52 (-250 av. J.-C.)
1Q7 (-50 av. J.-C.)
4Q51 (3e quart du 1er siècle av. J.-C.)
4Q53 (1er quart du 1er siècle av. J.-C.).