COMPRENDRE LA GRAMMAIRE BIBLIQUE AVEC FR. MARTIN STASZAK, OP
Polysémique, servant à exprimer à la fois une origine et une distance, Min ( מִן ) est la troisième préposition la plus utilisée de l’Ancien Testament. Le fr. Martin STASZAK, o.p., revient sur la genèse et le but de sa récente publication.
Quelle est l’origine de ce livre ?
« L’idée vient des trois volumes du théologien suisse Ernst JENNI (1927-2022) qui a enseigné l’Ancien Testament à Bâle, dont beaucoup d’études grammaticales. Il a écrit trois volumes de base traitant des prépositions hébraïques Beth, Kaph et Lamed ; une étude plus approfondie de Min, la troisième plus courante dans l’hébreu biblique et l’araméen, s’imposait.
L’objectif est de faire progresser la recherche linguistique sur l’Ancien Testament et d’aider à clarifier un certain nombre de doutes linguistiques et sémantiques ainsi que des problèmes de traduction. Des voies nouvelles sont empruntées : le réseau polysémique que forme Min est systématiquement présenté. Le fonctionnement des prépositions hébraïques est élargi à une nouvelle théorie d’ensemble et la question du sujet logique dans des phrases passives (80 % de l’usage de ces prépositions) est abordée. C’est surtout dans les textes tardifs que cette préposition joue le rôle d’indiquer un sujet logique, à mon avis sous l’influence de la grammaire grecque.
On retrouve notamment Min quand Dieu conduit les hébreux depuis l’Égypte vers la Terre promise. »
As-tu rencontré des difficultés lors de la rédaction ?
« C’est un travail de longue haleine au cours duquel j’ai exploré en profondeur la polysémie de la préposition Min. Pendant 2 ans et demi, ce sont pas moins de 8 000 occurrences qu’il a fallu examiner pour parvenir à dresser un registre d’une quarantaine de pages. L’objectif du livre est d’éclairer des difficultés persistantes de traduction et de compréhension, afin de mieux percevoir le sens de cette préposition dans les Écritures. C’est la différence avec nos langues modernes qui n’ont pas ces concepts : la même préposition peut prendre un sens différent, si ce n’est opposé. Par exemple al ( על ) qu’on retrouve dans la compagnie aérienne El Al, signifie haut, au-dessus de quelqu’un. C’est un rapport de supériorité, de hiérarchie et également d’addition.
J’ai pu travailler de façon continue, en particulier il y a deux ans et demi au cours de deux mois passés au Canada à l’issue de mon mandat de prieur. Là, j’ai beaucoup avancé. En effet, j’avais moins de responsabilités et donc davantage de temps. Des mois très agréables dédiés à la recherche. De retour à l’ÉBAF, j’ai utilisé les ressources de la bibliothèque, particulièrement les nombreux commentaires qu’elle contient sur tous les livres de l’Ancien Testament. J’ai aussi pu inclure dans ces travaux des collègues à l’international. Je pense en particulier à Camil STAPS de l’université de Leiden qui faisait sa thèse de doctorat sur un sujet similaire au mien. Il m’a donné accès à son manuscrit en avant-première ce qui fut un enrichissement très positif. Je pense aussi à Vladimir OLIVERO, de l’université d’Harvard, qui, lui aussi, a mis à ma disposition un chapitre de sa thèse non publiée. Il était présent à l’ÉBAF l’an dernier, pour enseigner l’akkadien et faire de la recherche. »
À qui ton livre s’adresse-t-il ?
« Ce livre se veut un soutien aux étudiants et professeurs d’exégèse qui recherchent la signification exacte de cette préposition dans les textes rédigés en hébreu biblique. Cela aide à bien comprendre cette structure. »
Quels sont tes futurs projets d’écriture ?
« Je suis heureux d’avoir été chargé d’écrire un commentaire sur I. Samuel 16-31. David, persécuté par Saül, qui meurt pendant la guerre contre les philistins, accède alors au pouvoir et lui succède sur le trône d’Israël. Après avoir travaillé sur des questions techniques, il n’est pas mauvais de revenir à des textes narratifs ! »
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