Le 21 février, Yair Zakovitch, professeur émérite à l’Université hébraïque, a donné la première conférence Lagrange de cette année. Le titre de son discours était “Sur l’amour et la beauté : les relations complexes entre le Cantique des Cantiques et le récit biblique”. Ayant publié de nombreux articles sur les techniques variées de la narration déployées dans la Bible et sur le Cantique lui-même – y compris le précieux commentaire de Herder sur le livre -, le sujet de la conférence représente une intersection des intérêts savants du professeur Zakovitch. Il représente également la pointe d’une nouvelle vague d’érudition du Cantique.
Pendant des décennies, il a été coutumier – en fait, un dogme presque académique – d’isoler les traditions littéraires du Cantique des traditions bibliques plus larges, en particulier la littérature prophétique et les récits bibliques racontant l’histoire d’Israël. Récemment, cependant, certains chercheurs ont commencé à appuyer des arguments pour reconnaître les allusions bibliques dans le Cantique, travaillant à réintégrer ce spécimen unique de la poésie amoureuse biblique dans un monde de pensée biblique plus large. La présentation du professeur Zakovitch fait partie de ce débat naissant et a fourni un avant-goût du matériel qui paraîtra bientôt dans son étude à venir : Le Cantique des cantiques : l’énigme des énigmes (T & T Clark, septembre 2018).
Après avoir soigneusement énuméré les nombreuses bonnes raisons de reconnaître la véritable distance qui sépare le récit biblique du Cantique, le professeur Zakovitch a attiré l’attention sur plusieurs passages où le poème montre néanmoins de subtils contacts avec de telles traditions. Il a ensuite systématiquement travaillé son chemin à travers les récits de la Genèse à Esther, soulignant les liens qu’il voit aussi et se déplaçant dans la direction opposée. Sans peser sur la direction de l’influence, le simple argument de la quantité (il reconnaît avoir fait des suppositions “risquées” à différents points) signifie avancer le nouveau paradigme et la thèse qu’aucun rideau de fer ne doit être érigé entre ces deux corpus bibliques. Motifs, jeux de mots et autres modes de pensée subtils sont vraisemblablement partagés en commun à plusieurs points. Il est correct, en bref – avec toutes les distinctions appropriées à l’esprit – de penser à une mentalité biblique unifiée et de lire le Cantique dans ce contexte.
Au cœur de l’interprétation du professeur Zakovitch se trouve une volonté de voir un esprit humoristique et taquin dans la poésie du Cantique. Ceci est présent dans le sous-titre de son travail à venir : Riddle of Riddles. Si une certaine saveur rabbinique colorait cette perspective, il ne fut pas surprenant dans la session de questions-réponses d’entendre qu’il était prêt à accepter l’orientation “allégorique” de la chanson. Si la discussion était trop courte pour développer tous les arguments qui pourraient être pertinents à cet égard, il a promis qu’il aborderait également dans le livre les relations très importantes (et non moins complexes) entre la chanson et la littérature prophétique. Après avoir abordé tout ce débat important sur le sens ultime de la chanson lors de la défense doctorale de Nina Heereman en octobre, l’École s’est réjouie de cette première conférence Lagrange pour 2018 pour poursuivre son engagement sur le thème.
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